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Écrire à l’extrême de sa vie

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La Bibliothèque nationale de France rassemble plus de 150 manuscrits rédigés dans des situations extrêmes par des personnalités comme Napoléon Ier, Marie-Antoinette, Alfred Dreyfus, Guillaume Apollinaire ou encore Marie Curie mais également écrits par des anonymes témoins des atrocités des guerres mondiales.

« Mon Dieu, ayez pitié de moi ! Mes yeux n’ont plus de larmes pour pleurer pour vous mes pauvres enfants ; adieu, adieu ! Marie-Antoinette ». Quelques heures avant son exécution, le 16 octobre 1793, Marie-Antoinette rédigea ces quelques mots dans son livre d’heures. L’exposition de la BnF étant organisée selon quatre thèmes (péril, prison, possession et passion), le manuscrit de la reine de France est présenté dans la salle consacrée au péril.

Elle y côtoie le brouillon de l’acte d’abdication de Napoléon Ier écrit à Fontainebleau le 4 avril 1814, une lettre de Guillaume Apollinaire du 10 avril 1915 lors de la Première Guerre mondiale, mais également des lettres émouvantes de soldats adressées à leurs parents ou à leurs femmes contenant leurs dernières volontés. Pièce étonnante de la salle, une lettre fut écrite par le missionnaire jésuite Joseph-Antoine Poncet de la Rivière, le 28 juin 1647, sur une écorce de bouleau pendant sa mission chez les Hurons.

                  Livre d'heures de Marie-Antoinette                                           Brouillon de l'acte d'abdication de Napoléon Ier

 

La salle suivante est dédiée aux manuscrits rédigées dans des conditions d’enfermements, en prison, pendant un interrogatoire ou en route pour les camps de concentration. C’est le cas par exemple d’un message jeté d’un train de déportation le 24 janvier 1943 par Simone et Marie Alizon : « Mon petit Papa chéri, nous sommes dans le train pour l’Allemagne toutes les deux, bonne santé bon moral. Renseigne toi Croix Rouge. Ne t’inquiète pas pour nous. Courage mon Petit Père. À bientôt. C’est la fin ! Nous t’embrassons bien bien fort.. Tes deux petites filles qui t’aiment de tout leur cœur. Simone, Marie ».

 

Une inscription inscrite par un résistant probablement torturé fut retrouvée sous une chaise en bois au siège de la Gestapo à Paris. Plus loin, le visiteur tombe sur un document surprenant : des phrases écrites par le célèbre prisonnier Latude, en 1761, à la Bastille, avec son propre sang sur sa chemise, car ses geôliers lui avaient refusé de lui donner de l’encre et du papier. Autres textes, les derniers vers à lire avec une loupe du poète André Chénier qu'il glissa, la veille de son exécution en 1794, dans du linge pour qu’ils soient transmis à son père.

 

 

 

 

 

 

 

                                                                                       Vers d'André Chénier

 

 

Possession et passion

La troisième salle, si l’on continue la visite dans le sens contraire des aiguilles, est dédiée à la possession, comme la folie ou le spiritisme avec les célèbres séances de tables tournantes de Victor Hugo de 1853 à 1855. Dans un carnet, on apprend par la plume du poète et écrivain qu’il fut contraint d’écrire dans l’obscurité ce que lui disait l’esprit.

 

Autre document angoissant, la confession pendant une séance d’exorcisme le 19 mai 1634 du démon Asmodée par l’intermédiaire de la sœur Jeanne des Anges, mère prieure du couvent des Ursulines, lors de l'affaire des possédées de Loudun. Dénoncé par les sœurs pour avoir provoqué ces possessions puis innocenté, le père Urbain Grandier fut tout de même condamné au bûcher et mourut le 18 août 1634 car il s'était, entre autres, attiré l’hostilité du cardinal de Richelieu.

  Procès-verbaux de séances spirites tenues chez Victor Hugo                    Confession manuscrite du démon Asmodée

Le dernier espace de l’exposition est consacré à la passion, qu’elle soit amoureuse ou au contraire le résultat d’un deuil. Deux manuscrits offrent notamment aux visiteurs un témoignage bouleversant de l’expression d’une douleur à la suite de la perte d’un être cher : celui des Mémoires de Saint-Simon dans lequel des petits hiéroglyphes faits de croix et de larmes symbolisent les mois de deuil du mémorialiste lorsqu’il cessa d’écrire après la mort de sa femme.

Puis celui de Marie Curie qui écrivit après la mort de son époux ces mots : « L’horrible nouvelle m’accueille. J’entre dans le salon. On me dit : « Il est mort ». Peut-on comprendre des paroles pareilles ? Pierre est mort, lui que j’ai vu partir bien portant ce matin, lui que je comptais serrer dans mes bras le soir, je ne le reverrai que mort et c’est fini à jamais. Je répète ton nom encore et toujours. « Pierre, Pierre, Pierre, mon Pierre », hélas cela ne le fera pas venir, il est parti pour toujours ne me laissant que la désolation et le désespoir ». Sur les pages de son journal, on peut y voir deux traces de larmes.

                           Mémoires de Saint-Simon                                                                         Journal de Marie Curie

Manuscrits de l’extrême, jusqu’au 7 juillet 2019, Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, quai François-Mauriac, 75706 Paris Cedex 13. bnf.fr

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